Une bouffée d'oxygène

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Pas de repos pour la maladie du sommeil

Bien que dignes des meilleurs récits fantasmagoriques, la maladie du sommeil et son vecteur, la mouche tsé-tsé, sont loin d’être des chimères. Ce fléau sévit encore en Afrique, favorisé par la multiplication des contacts entre l’insecte vecteur et l’homme. On compte ainsi de nombreux foyers en Afrique de l’Ouest, plus particulièrement dans la mangrove guinéenne et la forêt ivoirienne. Les 30 et 31 octobre derniers, près de 70 chercheurs, collaborateurs financiers et partenaires techniques se sont donnés rendez-vous au Centre culturel franco-guinéen de Conakry, capitale de la République de Guinée. L’occasion de faire le point sur les progrès réalisés en terme de lutte et de prévention pour combattre cette maladie qui, en l’absence de traitement, est fatale à l’homme.
 
Baptisée « trypanosomose humaine africaine » ou THA par les chercheurs, la maladie du sommeil est une maladie parasitaire transmise à l’homme par un insecte, la glossine, plus connu sous le nom de mouche tsé-tsé. Elle affecte principalement les populations rurales, dont la subsistance dépend de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage.
 
Contrairement à ce que suggère la croyance populaire, les personnes affectées ne subissent pas le même sort que la belle au bois dormant. S’il est bien question d’un trouble du sommeil, le désordre relève plus d’un dérèglement du cycle normal du sommeil. Le malade en vient ainsi à dormir le jour et veiller la nuit. Le parasite responsable de la maladie (Trypanosoma brucei) contamine le sang de son hôte, puis son système nerveux, d’où l’apparition de ces troubles du sommeil. S’en suivent des troubles sensoriels, moteurs, psychiques et neurologiques. Selon l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), les rares traitements actuellement disponibles sont très toxiques et nécessitent une hospitalisation de trois à quatre semaines. 

Au milieu du 20e siècle, la maladie du sommeil a, à tort, été considérée comme maîtrisée. Le dépistage de masse fut stoppé et la surveillance médicale se relâcha. Conséquence de ce relâchement, on assiste dans les années 1980 à une réémergence de la maladie. D’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), on recensait 40 000 cas déclarés et 300 000 personnes infectées en 1998. Après plus de dix années de lutte pour enrayer cette épidémie, le nombre de cas rapportés a chuté à moins de 10 000 en 2009, et ce pour la première fois en 50 ans. Les efforts de lutte se sont concentrés sur la Guinée, pays d’Afrique de l’Ouest le plus touché par la maladie. La mise en place en 2002 du Programme National de Lutte contre la THA (PNLTHA) a permis de dépister et traiter plusieurs centaines de malades, principalement dans les zones de mangrove du littoral guinéen. 

Mais la maladie du sommeil reste un inquiétant problème de santé publique pour certaines régions d’Afrique. Si les efforts menés au cours des dernières années ont porté leurs fruits, les acteurs de cette lutte n’entendent pas s’arrêter en si bon chemin. L’IRD poursuit ainsi ses recherches pluridisciplinaires (étude des bases moléculaires et cellulaires de l’infection, approches diagnostique, thérapeutique, antiparasitaire etc.), en collaboration avec des organismes de recherche implantés en Afrique de l’Ouest. Les 30 et 31 octobre derniers, le PNLTHA guinéen, l’IRD et le CIRDES (1) ont organisé un atelier scientifique au Centre culturel franco-guinéen de Conakry. Près de 70 scientifiques, partenaires financiers et techniques ont répondu présents afin de présenter les conclusions de plus de 10 ans de recherche sur cette maladie. Ils ont notamment évoqué la mise au point de la « trypanolyse », technique de diagnostic qui permet de tester en laboratoire un grand nombre de personnes.  
1- Le Centre International de Recherche-Développement sur l’Elevage en zone Subhumide (Cirdes) est basé à Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso. 

Cécile Cassier


17/11/2012
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